Les Toits du Cœur affichent presque toujours complet au Mans
Publié : 4 juillet 2019 à 10h36 par à‰lise Catalanotti
Dix-huit personnes en difficulté, des mères et leurs enfants, sont hébergées en ce moment à l'hôtel social des Restos du C-ur au Mans, quartier Vauguyon. Un lieu qui leur permet de reprendre leur vie en main.
La grande bâtisse de la rue de la Fraternité comprend un bureau, une cuisine, un salon et une cour où les enfants peuvent jouer. Voilà pour les parties communes de l’hôtel social des Restos du Coeur, auxquelles s’ajoutent onze petites chambres spartiates avec salle de bain. Des logements homogènes, autonomes, équipés et meublés, car cette structure est destinée à apporter une solution d’hébergement ponctuelle à prix modéré, aux personnes éprouvant des difficultés financières et sociales pour se loger.
Dans une rue calme, c’est un lieu où se poser, se ressourcer. En ce moment onze femmes sont accueillies aux Toits du Coeur avec leurs enfants, scolarisés pour la plupart. Soit dix-huit personnes en tout, la capacité maximale. Un bénévole est toujours à leur disposition, sauf la nuit.
Ce type de structure n’existe pas partout en France. L’hôtel social du Mans a ouvert ses portes en 1992 : au départ il hébergeait essentiellement des hommes sans foyer. Mais le bâtiment a été dévasté par un incendie en 2008 à cause d’un court-circuit, et à sa réouverture deux ans plus tard, il a été réservé en priorité à des mères, par souci de sécurité. "Il fallait que ce soit un lieu serein" explique Lydia Lautru, la bénévole responsable de la structure. Néanmoins un couple peut s’y voir exceptionnellement proposer une chambre.
Quatre nationalités représentées en ce moment
Certaines des femmes qui y vivent actuellement viennent d’arriver en France. Elles sont Africaines, Russes, Polonaises, ou encore de Mayotte et Madagascar. Et parfois, pour se faire comprendre au début, elles dessinent. Seul point commun dans leurs parcours : les difficultés rencontrées. Même si la nature même de leurs problèmes varie d’une résidente à une autre : "Jamais des personnes sans papier. Ou elles ont été battues, ou elles n’arrivaient plus à payer un loyer… C’est principalement ces raisons qui les amènent ici" ajoute Lydia Lautru.
Les femmes dont le dossier est retenu par les Restos du Cœur peuvent se poser, pour trois mois renouvelables une fois en principe, "mais ça dépasse souvent, et on les laisse... A partir du moment où elles sont correctes, on ne les mettra pas dehors" reconnaît Lydia Lautru. L’une d’elles est restée jusqu’à deux ans dans la maison.
Les résidentes cuisinent ensemble les déjeuners et dîners qu’elles mangent ensuite en commun dans le salon avec bénévoles et salariées des Restos du Coeur. Le matin et le week-end en revanche, elles sont en autonomie : "Elles sont souvent déboussolées, donc on a souvent des personnes en retrait dans un premier temps" constate Mylène Viot, l’une des deux salariées des Restos sur place toute la semaine. "Mais c’est justement le fait de manger ensemble, de rencontrer d’autres personnes qui recrée du lien social, ça leur permet de reprendre confiance en elles et d’avancer. On organise aussi des sorties l’été, des pique-niques par exemple" ajoute-t-elle. Un partenariat a été conclu avec l’équipe mobile psychiatrique précarité au côté de laquelle elle organise des ateliers sur l’estime de soi, et profite aussi d’actions comme "Osez Bougez" pour proposer des activités sportives.
Florence Rottereau, l’autre salariée, est maîtresse de maison depuis 2010 à l’hôtel social et ne se lasse pas de ce poste : "Maîtresse de maison c’est assez varié, cela inclut la gestion des stocks, faire les menus, les plannings, c’est moi qui gère également les quittances de loyers, les factures, et je les envoie au siège social. Après il y a aussi une gestion humaine, des conflits, des désaccords, les petites disputes, les chagrins aussi... Quand les gens veulent discuter, le bureau est ouvert !".
Un règlement intérieur à respecter
Quelques règles s'appliquent évidemment à l'hôtel social : "C’est pas bien compliqué, les pensionnaires doivent respecter déjà le lieu où elles sont, donc leur chambre. Après il y a des tâches ménagères, chacune en a une par jour. On veille bien à ce que ce soit fait pour les réadapter. Il faut aussi qu’elles rentrent normalement à 22h au plus tard et n’amènent pas de personnes extérieures à l’établissement, pour que ce soit sécurisant et qu’il n’y ait pas de souci pour les autres résidents ou les enfants".
Pour les occupantes de l’hôtel, ce lieu est un vrai tremplin. Le fait de payer un petit loyer les réhabitue à gérer un budget. Ce dernier est calculé proportionnellement aux rentrées fionancières de chacune, entre 10 et 15% des revenus -salaire éventuel, RSA, allocations, etc-. Mylène Viot, conseillère en économie sociale et familiale, propose son aide aux démarches administratives afin que les personnes hébergées puissent reprendre leur vie en main : "Moi je suis là pour les orienter, je ne les accompagne pas à l’extérieur en général, je les aide pour les démarches en ligne sur l’ordinateur à leur disposition ici, et lorsqu’il faut se rendre en préfecture par exemple je les laisse faire par elles-mêmes pour qu’elles puissent s’autonomiser aussi, pour qu’elles puissent y arriver toutes seules après leur passage ici".
Parmi elles, par exemple, depuis un peu plus de deux mois, une femme d’une quarantaine d’années et sa fille âgée de quatorze ans, qui ont été mises à la porte par le conjoint. La maman trouve l’endroit stable, reposant : "On est bien tranquille, et dans une phase de progression maintenant, parce qu’on reçoit beaucoup de coups de pouce. L’accord avec les agences d’intérim par exemple, pour chercher des missions professionnelles de longue durée, et si celles-ci sont loin du Mans, la possibilité de se faire prêter une voiture ou d’en acheter une en payant en plusieurs fois, l’accompagnement jusqu’à l’obtention d’un appartement aussi. Ils nous emmènent jusqu’à l’indépendance, ils ne nous lâchent pas. C’est vraiment un endroit où s’épanouir dans la vie active ensuite, on est comblées matériellement, moralement et physiquement, nourries… blanchies, loin des soucis d’avant !".
Avant de quitter cette structure familiale, elle contribuera elle aussi comme tous les occupants de l’hôtel social à embellir un peu les lieux. Pour redonner un peu de gaieté aux murs tristounets qui n’ont pas bougé depuis la réouverture en 2010, un atelier peinture et pose de sol est prévu : les pots de peintures et le vinyle ont été offerts par l’entreprise Grassin Décors. Par ailleurs, la responsable lance un appel au don de meubles, tables, chaises, fauteuils pour remeubler la salle de séjour. Il suffit de se faire connaître auprès des Restos du Cœur sarthois.