Loi Rist : "Nous allons avoir des fermetures immédiates" déplore Harold Huwart

Harold Hüwart

3 avril 2023 à 16h38 par Noëlline Garon / crédit photo : ville de Nogent-le-Rotrou

La loi Rist qui encadre la rémunération des médecins intérimaires est entrée en vigueur ce lundi 3 avril. Ces praticiens qui interviennent dans des hôpitaux publics ne pourront plus être rémunérés plus de 1 390 euros brut pour 24 heures de travail. Une réglementation qui va "affaiblir les établissements de nos campagnes" selon Harold Hüwart, maire de Nogent-le-Rotrou et président du conseil de surveillance de l'hôpital local. Entretien.

Sweet FM : Que vous inspire cette loi ?

Harold Huwart : C’est une volonté du gouvernement d’encadrer la rémunération des médecins privés qui exercent à l’hôpital. L’intention est bonne, le problème c’est que dans certains hôpitaux, notamment ceux de proximité, énormément de missions dépendent de ces praticiens issus du privé. C’est le cas à Nogent-le-Rotrou, dans le bloc chirurgical, dans les services de radio, de scanner et aux urgences. Cette loi mous met en difficulté et pourrait entraîner des désorganisations et des fermetures immédiates.

Quelles sont les difficultés que va rencontrer le centre hospitalier de Nogent-le-Rotrou avec cette loi ?

On a construit notre activité sur des coopérations entre public et privé. Augmenter le salaire des médecins libéraux de 20 à 30%, c’est le moyen pour l’hôpital de rémunérer le fait qu’ils se déplacent. Ils viennent du Mans, de Chartres et de Paris. On sait qu’ils ne viendraient pas s’il n’y avait pas ce surplus de rémunération. Certes, on lutte contre ce qu’on appelle les "médecins mercenaires", mais il n’y en a pas dans les hôpitaux de proximité comme Nogent-le-Rotrou. Il y a seulement des médecins privés qui viennent assurer des soins sur place et éviter aux patients de parcourir les 70 ou 80 kilomètre qui les séparent des grands hôpitaux.

Harold Huwart :

Avec cette loi, c’est aussi la fin d’une certaine surenchère qui peut exister entre les établissements ?

Il s’agit de l’argument avancé par les autorités et les grands hôpitaux. Ce n’est pas ce qu’on constate. Dans nos établissements de proximité, cela va entraîner des désorganisations. A Nogent-le-Rotrou, nous avons dix praticiens hospitaliers publics donc si nous n’avons pas de médecins privés, nous ne faisons pas tourner l’hôpital. A Chartres, ils sont 300, à Blois, 400. La réalité à Nogent c’est que nos médecins sont là depuis huit ou neuf ans, ils ont l’habitude de venir plusieurs fois par mois. Leurs tarifs n’ont pas été revus depuis 2009. Ce qu’on nous raconte sur la flambée des prix, le mercenariat, ça peut exister dans certains grands hôpitaux mais pas à Nogent-le-Rotrou. Je suis consterné de voir que la situation des petits hôpitaux n’est pas prise en compte et qu'on risque donc d’aboutir à de très fortes désorganisations.

Vous craignez des fermetures à Nogent-le-Rotrou ?

On a réussi à trouver des solutions pour le mois d’avril. Par exemple, aux urgences, c’est la cheffe du service qui va assurer de très longues permanences. On continue à discuter avec de nombreux médecins pour qu’ils restent jusqu’en juin. Nous sommes dans une véritable incertitude. Pour vous donner une idée, à Nogent-le-Rotrou, il y a huit urgentistes sur quatorze qui viennent du privé, quatre anesthésistes sur cinq, trois radiologues sur quatre. Si nous ne sommes pas capables de pérenniser notre collaboration avec ces médecins, nous allons avoir des fermetures immédiates, cela va aboutir à une baisse d’activité, les comptes de l’hôpital passeront dans le rouge. Nous nous réunirons l’année prochaine pour fermer des services. C’est une perspective que je refuse et que je combattrai de toutes mes forces.

Harold Huwart :

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