Dans l’ouest, coup de filet sur un réseau de passeurs de migrants

SWEET FM
L'aire de repos "Sarthe-Sargé-Le Mans" le long de l'A11
Crédit : Google Street View

25 janvier 2020 à 23h03 par Emilien Borderie

Seize Irakiens, membres présumés d'un vaste réseau d'émigration clandestine, ont été mis en examen ces 23 et 24 janvier. Notamment interpellés au Mans, ils sont soupçonnés d'avoir organisé le passage, entre la France et la Grande-Bretagne d'environ 10 000 migrants.

Rappelons d’abord qu’on ne décide a priori jamais de gaieté de cœur de fuir son pays... Ce mardi 21 janvier, pas moins de 70 hommes de la Direction centrale de la police aux frontières française ainsi que 40 agents du RAID sont intervenus simultanément aux Pays-Bas, à Châtellerault mais aussi et surtout au Mans dans le cadre d’une enquête entamée à l’été 2018 portant sur un important réseau de passeurs de migrants clandestins venus notamment de la région du Kurdistan. Dix-neuf personnes ont été interpellées côté français. En Sarthe, deux armes de poing "approvisionnées" ont été saisies, au même titre que sept véhicules dédiés selon toute vraisemblance au transport des candidats à l’exil en Grande-Bretagne.

Seize mises en examen

Seize individus, "de nationalité irakienne et originaires du Kurdistan selon leurs explications, ont été présentés les 23 et 24 janvier devant un juge d'instruction qui a procédé à leur mise en examen puis à leur placement en détention provisoire" précise le parquet de Rennes, chargé du dossier. Les chefs d’accusation sont les suivants : "aide au séjour irrégulier d'un étranger", " traite des êtres humains en bande organisée", "blanchiment en bande organisée" et "participation à une association de malfaiteurs". En un an et demi, près de 10 000 migrants auraient eu recours à ce réseau initialement implanté dans le nord avant de s’étendre à un large quart nord-ouest. Gain estimé pour les organisateurs -qui encourent jusqu'à vingt ans de réclusion criminelle- : environ 70 millions d’euros.

Dans des remorques frigorifiques

C’est la constatation, en août 2018, d’embarquements répétés de migrants à l’arrière de poids-lourds sur deux aires d'autoroute sarthoises qui a conduit au démarrage des investigations : "Au cours de la nuit, les passeurs profitaient du sommeil des conducteurs et du bruit des groupes frigorifiques pour forcer les portes des remorques et faire monter jusqu'à vingt migrants par ensemble routier, à destination des ports majeurs de la zone ouest ouverts au trafic vers le Royaume-Uni" explique-t-on, en soulignant que ce mode opératoire "présentait manifestement le risque que la température ambiante soit très basse et que soit ainsi exposée la santé des occupants, le plus souvent des hommes mais également des familles avec enfants".

Réglement de compte fatal au Mans

"Le réseau disposait de chauffeurs acheminant les migrants sur les zones d’attente, notamment dans la région du Mans, de Tours et de Poitiers, puis de passeurs se fondant dans les groupes de migrants dans la phase d'embarquement sur les aires de repos des autoroutes A28, A11 et A10 entre Alençon, Orléans et Poitiers" fait savoir le parquet de Rennes. Aux portes du Mans, un "lieu d'hébergement précaire" avait été créé dans une scierie désaffectée proche du dépôt des tramways : c’est là que "des rivalités entre acteurs concurrents" ont abouti au meurtre d’un des protagonistes le 8 janvier dernier, à l’arrestation de deux Irakiens âgés de 19 ans pour l’un, 20 pour l’autre, et l’ouverture d’une information judiciaire pour "meurtre en bande organisée".